À travers une enquête menée simultanément en France et au Québec, Olivier Cousin et Andy Smith signent IA et santé : l’âge des possibles et dressent un constat clair : les logiques propres à l’intelligence artificielle s’accordent mal avec les normes, les valeurs et les pratiques du secteur de la santé. Pire encore, les acteurs de ce domaine semblent peu mobilisés pour combler cet écart. Depuis l’irruption spectaculaire de ChatGPT à l’automne 2022, l’intelligence artificielle générative est devenue accessible à tous. Polyvalente, omniprésente, parfois perçue comme omnipotente, l’IA alimente une économie de la promesse, fondée sur un imaginaire spéculatif où les frontières entre ce qui est possible, ce qui est en cours de développement et ce qui existe déjà deviennent floues. Elle brouille les temporalités : le présent, le futur et l’hypothétique se confondent.
Dans le domaine de la santé, l’IA cristallise les espoirs d’une médecine du futur, plus personnalisée, plus prédictive, et profondément transformée. Mais derrière les discours enthousiastes et la médiatisation, la réalité est plus contrastée : l’intelligence artificielle reste en grande partie aux portes des établissements de santé, pourtant avides d’innovations. Les auteurs de cette étude montrent que ce retard d’intégration tient moins à la technologie elle-même qu’à la complexité du monde médical, et notamment hospitalier, avec ses logiques propres, ses contraintes réglementaires, éthiques et organisationnelles. L’IA en santé demeure ainsi à l’état de potentiel, à « l’âge des possibles », freinée dans son déploiement par des structures encore peu préparées à l’accueillir pleinement.
Presses de Sciences Po, 264 pages, ISBN 9782724644357, prix de vente 21 €
Article paru dans mySIH magazine, édition de juillet 2025, à lire ici.



